Surveillante tuée à Nogent : portiques, réseaux sociaux, interdiction de la vente de couteaux, prise en compte de la santé mentale… Quelles sont les pistes sur la table ?

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Après le meurtre d’une surveillante de collège mardi, le président Emmanuel Macron et le Premier ministre François Bayrou ont promis d’interdire la vente de couteaux aux mineurs. Une réponse sécuritaire après de multiples drames récents.

Par  B. M. (avec AFP)

Publié le , mis à jour le

Emmanuel Macron et François Bayrou à l’Elysée, le 15 avril 2025.

Emmanuel Macron et François Bayrou à l’Elysée, le 15 avril 2025. SARAH MEYSSONNIER/AP/SIPA

Des affrontements entre bandes rivales au « déferlement de violence insensé » décrit par Emmanuel Macron après le meurtre d’une assistante d’éducation, poignardée mardi 10 juin à l’entrée d’un collège à Nogent (Haute-Marne), ces derniers mois, l’exécutif a mis au cœur du débat la problématique du port d’armes blanches chez les mineurs. Un cadrage surtout répressif, mettant la prévention au second plan.

Les annonces se sont enchaînées. Sur TF1 mardi soir, le Premier ministre François Bayrou a ainsi affirmé vouloir « élargir la liste des armes » blanches interdites à la vente, alors que « pour l’instant, il n’y a que les poignards qui sont interdits ». Et, à peine quelques minutes plus tard, le président de la République Emmanuel Macron a renchéri sur France 2 : « Un jeune de 15 ans ne pourra plus acheter un couteau sur internet. »

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• De récentes agressions mortelles

Si le port d’armes blanches chez les mineurs pose tant question, c’est que plusieurs drames en lien avec cette problématique sont advenus ces derniers mois. Le 31 mai, par exemple : à Dax (Landes), en marge du sacre européen du PSG, un mineur a été mortellement touché de plusieurs coups de couteau portés au thorax. L’agresseur présumé a 16 ans, et un vol de casquette est potentiellement à l’origine du contentieux.

Autre cas : en avril, une lycéenne a été mortellement poignardée en pleine journée dans un établissement privé de Nantes. Le suspect, un élève, a été interpellé dans la foulée. Et quelques mois plus tôt, c’était l’affaire Elias : un collégien de 14 ans mort le 24 janvier après avoir été agressé à la sortie d’un entraînement de football pour avoir résisté au vol de son portable. L’un des deux adolescents mis en examen a reconnu l’avoir poignardé avec « une lame zombie killer », appellation tirée des films d’horreur, soit une « machette coupe-coupe, manche encordé avec une lame de 44,5 cm » achetée sur internet, selon une source proche du dossier.

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Au-delà de la France, le sujet est européen. Outre-Manche, il est même central : en Angleterre et au Pays de Galles par exemple, les actes de délinquance impliquant l’usage d’une arme blanche connaissent une hausse constante depuis 2011, selon le gouvernement. Dix adolescents ont ainsi péri dans des attaques au couteau l’année dernière à Londres, selon la police. C’était dix-huit en 2023. Au cœur de ces drames, parfois des guerres de territoires liées au trafic de drogue, mais aussi des insultes ou même une erreur d’identité.

• Ce que prévoient la loi et le gouvernement

Actuellement, les armes blanches sont classées en catégorie D, celle regroupant « les objets pouvant constituer une arme dangereuse pour la sécurité publique » (poignard, couteau, matraque, etc.). L’acquisition et la détention d’armes toutes catégories confondues sont interdites aux mineurs, à de rares exceptions près comme pour les chasseurs de plus de 16 ans ou pour les mineurs, en fonction de leur âge, détenteurs d’une licence de la Fédération française de Tir, de Ball-Trap ou de biathlon.

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François Bayrou doit prochainement rendre des arbitrages après la remise d’un rapport mercredi sur la détention d’armes blanches rédigé par la vice-présidente Horizons de l’Assemblée nationale, Naïma Moutchou. Cette dernière, missionnée par le chef du gouvernement après l’attaque mortelle d’une lycéenne à Nantes, explique que « n’importe quel territoire aujourd’hui est concerné ». Surtout, il n’y a « pas un profil » particulier, dit celle qui préconise le déploiement obligatoire de la vidéosurveillance à l’entrée mais aussi dans l’enceinte des établissements scolaires.

Lors des questions au gouvernement à l’Assemblée nationale, en début d’après-midi, François Bayrou a par ailleurs prôné « l’expérimentation » de portiques de détection d’armes à l’entrée des établissements scolaires. Mais l’idée, qui n’est pas nouvelle, a été vivement critiquée. Le patron du parti macroniste Renaissance, Gabriel Attal, a dans la foulée, sur BFM-TV, exprimé son scepticisme, doutant que ces portiques soient efficaces. Edouard Philippe s’est également montré dubitatif : « Je ne suis pas sûr que ça soit le bon message », a-t-il lancé sur TMC.

Enfin, Emmanuel Macron a affirmé mardi que la France interdira également les réseaux sociaux aux enfants de moins de 15 ans si, d’ici « quelques mois », cela n’est pas fait au niveau européen. « On doit interdire les réseaux sociaux aux moins de 15 ans », a dit le chef de l’Etat sur France 2. « Je nous donne quelques mois pour arriver à faire la mobilisation européenne. Sinon […] on commence à le faire en France. On ne peut pas attendre », a-t-il déclaré.

• Des solutions préventives, pas juste répressives

« On ne doit pas mourir de son métier quand on travaille dans l’Education nationale, mais il faut aussi trouver le bon équilibre pour que les établissements ne soient pas des bunkers », a commenté Laurent Zameczkowski, porte-parole de la Peep, fédération de parents d’élèves, après les annonces de l’exécutif. Et de continuer : « Le véritable problème est la santé mentale de nos jeunes. » Il a alors réclamé « un meilleur encadrement […] notamment en termes d’infirmières, médecins scolaires ».

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Auprès de l’AFP, Stéphanie Muller, assistante sociale scolaire dans le Val-de-Marne, partage cette inquiétude : « On se prend en première ligne le mal-être des gamins, la violence qu’ils peuvent vivre. Et s’ils en arrivent à poignarder comme avec cette AED, c’est qu’ils ne vont pas bien même si ça n’excuse pas un tel acte. » Plusieurs études le montrent : adolescents et jeunes adultes français sont nombreux à connaître des troubles mentaux, en premier lieu dépressifs et anxieux, et la tendance s’accentue depuis les années Covid du début de la décennie 2020.

Ainsi, par-delà la réponse sécuritaire, et si même les raisons précises du passage à l’acte de l’élève à Nogent restent pour l’heure inconnues, le drame alimente à raison les inquiétudes sur la santé mentale des jeunes et l’insuffisance des moyens pour y répondre. A gauche, le leader de La France insoumise Jean-Luc Mélenchon a appelé à « veiller à la santé mentale » des jeunes, en particulier des garçons, qui « s’enfoncent » dans la violence. A droite, même le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau l’a affirmé : « La réponse ne peut pas être seulement sécuritaire. »

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